Amour : mode d'emploi


Disclaimer : Les personnages de Largo Winch ne m'appartiennent pas et c'est bien dommage ! Seul Valérie est à moi, c'est toujours un début ^___^

Auteur : Scilia

Archives : www.bricbrac.fr.st

Résumé : Largo et Joy ont enfin fait l'amour mais la jeune femme ne veut pas donner suite à ce qu'elle considère comme une erreur.

Note de l'auteur : Vous allez lire la seule fic largojoyiste que j'ai écrite. C'est un cadeau pour une amie, Petit Ange, que j'avais " involontairement " fait pleurer à cause d'un de mes autres fics. Bonne lecture !

***

Prologue

Ça y est, il l'avait fait. Et il n'en était pas fier, loin de là. Joy lui lança un regard neutre. Il ne pouvait dire si elle lui en voulait ou était heureuse d'avoir crever l'abcès. Tant de mois, de semaines, de jours qu'il tentait de maîtriser son désir et ce soir…

- Joy, je…

Deux mots, deux simples mots, deux mots idiots, c'était tout ce qu'il arrivait à dire. Elle le regarda un court instant avant de prendre ses vêtements et de sortir de la chambre. Devait-il s'excuser ? Devait-il prendre tous les torts pour lui ? Il n'avait pas vraiment la sensation d'avoir fait quelque chose de mal pourtant, le silence de la jeune femme lui prouvait le contraire. Il passa son boxer et la suivit dans le salon. Elle était en train de se rhabiller en silence, il ne put s'empêcher de se voir lui ôter chacun de ses vêtements avec empressement, avec douceur, avec envie. Joy glissa les pans de son chemisier dans son pantalon avant de le fermer. Elle gardait obstinément les yeux vers le sol. Elle ne sentait pas le courage de lui dire. De lui dire quoi, pauvre idiote, se dit-elle, que tu ne l'aimes pas ? C'est faux et tu le sais pertinemment ! Ce n'était pas un moment d'égarement et cela, tu le sais aussi ! Joy enfonça ses ongles dans ses paumes, espérant que la douleur dévie le flot de pensées qui l'assaillaient. La tactique fut sans succès. Largo était toujours devant elle, vêtu en tout et pour tout de son caleçon, il semblait attendre un mot, une phrase, quelque chose qui lui prouve qu'il ne l'avait pas blessée, qu'elle était consentante autant que lui, que ce moment d'égarement n'en était pas vraiment un, mais elle restait obstinément silencieuse.

- Je… on doit parler, tenta Largo avec douceur.
- Il n'y a rien à dire. Pour ta propre sécurité, nous allons oublier ce qui c'est passé dans cette chambre. Je ne veux plus jamais en parler Largo et je te défends d'en parler à quiconque ! Déclara soudainement Joy d'une voix dure et froide.
- Mais…
- Je n'ai rien à ajouter, termina-t-elle en se dirigeant vers la porte du penthouse.

Largo la regarda partir, la retenir ne servirait à rien, il en était conscient. Une fois de plus, elle venait de décider de l'avenir de leur couple. Elle ne lui laissait pas le choix et cela le rendait fou. Il avait tenté, après la rupture qu'elle lui avait imposée, de l'oublier dans les bras de nombreuses femmes. Il ne pouvait pas nier avoir prit du plaisir à ces relations mais aucune n'avait le charme, l'esprit, les formes parfaites de Joy d'où les séparations rapides, brutales. D'un geste rageur, il balaya les quelques journaux et autres babioles qui traînaient sur la table basse. Il était en colère de s'être fait congédier de la sorte. Comment osait-elle le rejeter, lui, qui l'aimait comme il n'avait jamais aimé aucune autre femme ? Il en avait assez de cette apparente froideur qu'elle prenait quand leur amitié prenait un tour plus intime. Cela devait changer et pas plus tard que tout de suite. Il irait chez elle et la forcerait à regarder la vérité en face. Il l'aimait et elle l'aimait. Largo en était persuadé même si elle ne le lui avait jamais avoué. Il repartit dans sa chambre s'habiller, décider à conquérir Joy de toutes les manières possibles.

***

Rester maître de soi

Elle ne devait pas craquer, pas ici, pas maintenant. Maintenir son calme apparent, prendre l'ascenseur, rentrer chez elle, dormir. Non, elle ne pourrait pas dormir. Pas après avoir fait l'amour avec Largo, pas après l'avoir laisser caresser sa peau, pas après l'avoir embrassé, l'avoir serré contre lui,… Elle pinça les lèvres pour se contenir. Il était tard et il était peu probable qu'elle rencontre quelqu'un dans l'ascenseur qui venait enfin de s'arrêter au 62e étage. Hélas, il n'était pas vide. Joy maudit Simon qui l'arrêta pour lui dire quelques mots. Elle ne saisit quasiment rien de ce qu'il lui raconta, bafouilla un oui ou deux quand cela lui sembla opportun et entra dans l'ascenseur. Le regard toujours fixé sur Simon, ou plutôt sur un point loin derrière lui. Elle allait appuyer sur le bouton du rez-de-chaussée quand elle aperçut le torse de quelqu'un. Levant les yeux, elle s'avisa qu'il s'agissait de Kerensky. Ce Russe qui était, il y a peu de temps, de l'autre coté de la barrière, du coté des méchants alors qu'elle était du bon coté. Enfin, c'est ce qu'elle avait cru mais elle n'avait aucune envie de penser à son père et à la CIA maintenant.

- Il est tard, dit-il d'une voix grave.
- Oui.

C'est tout ce qu'elle arriva à lui répondre. Elle avait besoin d'être seule, de prendre ses distances par apport à Largo et voilà qu'elle tombait sur les deux autres membres de l'équipe. Joy se crispa un peu plus, ce qui ne passa pas inaperçu aux yeux de Georgi. Quelque chose ne semblait pas aller et il savait que Joy ne lui dirait rien s'il l'interrogeait. Il était en train de réfléchir à une autre option quand elle lui posa une question.

- Tu veux toujours m'offrir ce verre dont tu parlais l'autre jour ?

Kerensky leva un sourcil. Que se passait-il pour qu'elle veuille aller prendre un verre avec lui ? Il ne chercha pas à comprendre ce qui motivait sa demande. C'était une manière détournée de la part de la garde du corps de demander son aide. Aide qu'elle ne pouvait demander ouvertement sans froisser sa fierté.

- On prend ma voiture ? Proposa le russe.
- Oui, répondit Joy qui n'avait aucune envie de conduire.

Elle pouvait toujours laisser sa voiture au parking et prendre un taxi pour venir travailler le lendemain, peu importait. Elle avait besoin d'un verre, besoin de s'éloigner de cette tour d'ivoire et de son maître.

***

Ne pas abandonner

Largo entendit le bruit caractéristique d'une carte passée dans l'analyseur afin d'entrer au penthouse.

- Joy…, murmura-t-il en allant ouvrir la porte lui-même.

Il fut dépité de se retrouver devant Simon, il avait tellement espéré qu'elle revienne pour… mais non, il la connaissait trop bien. Elle n'aurait jamais fait cela.

- Salut Larg', je viens de croiser Joy. Elle tirait une tête d'enterrement, t'aurais dû voir ça !
- Où est-elle allée ?
- Aucune idée, sans doute chez elle. T'as qu'à demander à Kerensky, il est descendu avec elle !

Sans plus attendre, Largo s'empara de sa veste et déboula, sous l'œil étonné de Simon, dans le couloir. Il appuya d'un geste rageur sur le bouton de l'ascenseur qui n'était pas disponible.

- Hey, il t'a rien fait ce pauvre bouton ! S'exclama Simon qui venait de le rejoindre.
- Ne m'en veux pas, vieux frère, mais c'est pas le moment de… enfin, continua Largo en rentrant dans la cabine.

Simon eut juste le temps de monter avec Largo que celui-ci appuyait sur le bouton commandant la fermeture des portes.

- Tu vas m'expliquer ?
- Non.
- Ah ben ça, au moins, c'est direct, commenta le suisse. Comment tu veux que je t'aide si tu m'expliques pas ce qui se passe ?
- Je ne t'ai pas demandé de m'aider, répondit Largo un peu sèchement.
- Ok, je vois, fit Simon vexé qu'il le maintienne à l'écart de ses problèmes.

L'ascenseur s'arrêta au 3e sous-sol, Largo parcouru le couloir en un temps record et passa sa carte magnétique pour ouvrir le QG de l'Intel Unit. A sa grande surprise, Kerensky, malgré son habitude, ne se trouvait pas devant son poste de travail. Le bunker était vide. Largo ne put s'empêcher de laisser échapper un " merde " retentissant dans la salle. Simon le regarda intrigué sans poser de questions. Largo fit demi-tour et reprit l'ascenseur, direction le parking. Il allait se rendre chez Joy, défoncer sa porte si besoin était mais il allait lui parler ce soir, il s'en fit la promesse en montant dans sa Jaguar flambante neuve.

***

Un ami à l'écoute

Décidément, quelque chose n'allait pas, se répéta mentalement Kerensky en regardant Joy avaler son quatrième verres d'Ikon, une des nombreuses marques de vodka qu'on trouvait dans ce bar russe. Elle n'avait quasiment pas dit un mot depuis leur départ du groupe W et il respectait son silence. Il connaissait Joy. Quand elle aurait décidé de dire ce qu'elle avait sur le cœur, elle le dirait. Les banalités qu'on échangeait avant d'attaquer le véritable problème n'était pas son genre. Cela faisait près de deux heures qu'ils étaient là et Joy ne décolérait pas. Elle s'en voulait d'avoir fait l'amour avec Largo, de ne pas l'avoir repousser quand il l'avait embrassé, d'avoir céder aussi facilement quand il avait commencé à la caresser, mais elle le désirait tellement qu'elle en avait mal. Elle souffrait depuis des mois de le voir s'afficher avec des femmes qui semblaient savoir ce qu'elles désiraient, des femmes sûres d'elle. Tout le contraire d'elle en somme. Enfin, ce n'était pas vraiment juste, elle savait qu'elle voulait Largo, qu'elle l'aimait sincèrement, plus qu'elle n'avait jamais aimé aucun des quelques hommes qui avaient traversé sa vie. Mais elle savait aussi qu'elle ne voulait pas être de passage dans sa vie, elle ne voulait plus qu'on l'utilise, qu'on se serve d'elle pour mieux la rejeter ensuite. Elle était trop vieille pour jouer à ses jeux là. Quelque fois, quand elle ne parvenait pas à trouver le sommeil, elle s'inventait une vie où elle était mariée à Largo et attendait leur premier enfant. Elle s'imaginait des passages importants de leur vie : sa demande en mariage, la manière dont il réagissait quand elle lui annonçait pour le bébé, leur mariage entourés de tout les gens qu'elle aimait,… Le retour à la réalité était assez dur, de plus en plus dure. Et Joy savait que si elle n'arrivait pas à dompter ses sentiments, elle devrait démissionner de son poste. D'une certaine manière, cela lui aurait permit de se construire un avenir avec l'homme qu'elle aimait mais d'une autre, elle aurait eu l'impression de ne plus faire partie de l'Intel Unit, de leur petite famille.

- On ferme, fit le patron à Kerensky.

Ce dernier sortit quelques billets de sa poche et paya leurs consommations, ou plutôt celle de sa compagne toujours silencieuse. Elle ne semblait pas avoir entendu le patron et le Russe lui mit la main sur l'épaule pour la faire revenir à la réalité.

- Qu'est-ce que…
- Le bar ferme.
- Ah, se contenta de répondre Joy en descendant de son tabouret.

Elle évita soigneusement le miroir qui lui renvoyait son reflet déformé mais ne put s'empêcher de s'arrêter sur le reflet de Kerensky. Pourquoi n'était-elle pas tombée amoureuse de lui ? Joy devait reconnaître qu'il était plutôt séduisant, même avec ses cheveux coupés courts. Sa haute silhouette donnerait envie à n'importe qu'elle femme de se blottir entre ses bras puissants, ses mains semblaient autant faites pour donner la mort que pour caresser un corps de femme, ses yeux bleu… Stop, il fallait qu'elle arrête. Kerensky était peut-être séduisant mais il n'avait rien à voir avec Largo, il ne faisait pas naître les mêmes émotions en elle. Qu'en sais-tu ? Ne put s'empêcher de demander une voix dans son esprit. Il était vrai qu'ils avaient plus ou moins flirtés à noël dernier mais elle n'avait jamais imaginé que cela puisse aller plus loin. Kerensky était… il était… un collègue… un ami en quelque sorte mais pas un amant… un amoureux comme disent les enfants. Joy le suivit tel un automate jusqu'à la voiture. Georgi ne savait toujours pas quel était le problème de la jeune femme, ni même s'il pouvait l'aider, mais il jugea préférable de ne pas l'interroger.

***

Explications

Elle n'était pas chez elle et cela le rendait fou. Où Joy avait-elle pu disparaître à cette heure avancée ? Elle n'était pas au bunker, elle n'était pas dans ce bar qu'ils fréquentaient avec Simon, elle n'était pas chez elle. Elle n'avait quand même pas disparue ! En désespoir de cause, Largo s'était garé devant l'immeuble de la jeune femme, attendant son retour pour lui parler. Les secondes devinrent des minutes, les minutes devinrent des heures et l'impatience de Largo ne faisait que croître. Il observa un véhicule remonter la rue. Il ne s'agissait pas de celle de Joy, il en était certain pourtant il connaissait cette voiture noire. Cette dernière se gara devant l'immeuble de Joy. Largo vit avec étonnement la jeune femme en sortir en titubant légèrement. Kerensky vint à son secours et l'aida à traversa la rue sous les yeux avides du milliardaire.

- Je crois que tu as trop bu, nota Georgi en aidant sa compagne à composer le code de son immeuble.
- Mais non, répondit Joy qui commençait seulement à se sentir mieux.

L'alcool l'avait ragaillardit et avait légèrement éloigné ses problèmes. Kerensky était un charmant compagnon quand il le voulait. Joy le regarda ouvrir la porte en verre de l'immeuble et appuyer sur le bouton de l'ascenseur.

- Tu vas t'en sortir ?
- Bien sur, Joy Arden est capable de se sortir de n'importe quelle situation !
- Tu ne veux pas me dire…
- Non, Georgi, pas ce soir, reprit Joy avec un air triste. Tu ne voudrais pas m'embrasser ? Demanda-t-elle innocemment.
- Pardon ? Fit le Russe qui se demandait s'il avait bien entendu.

Au lieu de répéter, Joy se dressa sur la pointe des pieds et joignit ses lèvres à celle de Kerensky qui resta un instant indécis. Il se reprit néanmoins et éloigna Joy de lui. Elle n'était pas dans son état normal, elle avait beaucoup trop bu et si quoi que se soit devait se passer entre eux, bien qu'il en doutait il n'avait pas oublié la soirée de noël, cela ne serait pas de cette façon.

- Alors toi non plus, tu ne m'aimes pas ? Fit Joy vexée d'être rejetée.
- Je n'ai jamais dit cela, expliqua Georgi d'une voix douce.
- Pourquoi… ?
- Parce que quelque chose ne va pas, que je soupçonne que cela a un rapport avec Largo et que je ne veux pas que tu m'utilises, répondit-il sur le même ton.

Joy n'eut pas l'occasion de répondre. Largo décocha une droite à Kerensky qui ne l'avait pas entendu entrer. Le Russe se retrouva au sol, portant la main à sa mâchoire, sans comprendre ce qui venait de passer par la tête de son patron.

- Espèce de fumier ! S'écria Largo avec colère.
- Je peux savoir ce que tu me reproches exactement ? S'enquit Georgi en se remettant debout.
- Tu… tu l'as embrassé !
- Non, répondit tranquillement le Russe ravi d'une certaine manière que Largo fasse enfin quelque chose concernant le " problème Joy ".
- Comment ça non ? Je vous ai vu ! Hurla presque le milliardaire.
- Je peux savoir depuis quand tu surveilles mon appartement ? Demanda Joy qui avait dessoûlé d'un coup.
- Je ne surveille pas… et puis ne change pas de sujet ! Il t'a embrassé !
- Et alors ? Tu n'as aucun droit sur moi ! Si j'ai envie d'embrassé tous les hommes qui me ramènent chez moi, j'en ai le droit il me semble !
- Alors tu ne nies pas ?
- Non, Largo, je ne nie pas l'avoir embrassé mais si tu étais moins abruti, tu aurais remarqué qu'il m'a repoussé !
- Qu'est-ce que tu…, bredouilla soudainement Largo dont la colère venait de retomber à une vitesse vertigineuse.
- Je crois que je vais vous laisser régler votre problème, fit Kerensky avant de s'éclipser.

Il jeta un regard noir à Largo mais, dans le fond, il ne lui en voulait pas vraiment. Il aurait réagit de la même façon dans ce genre de situation. Preuve en était sa réaction, ô combien lointaine mais toujours douloureuse, quand il avait trouvé Anya et son meilleur ami ensemble. Au moment où il passait la porte de l'immeuble, la porte de l'appartement du rez-de-chaussée s'ouvrit. Une vieille dame sortit, armée d'un rouleau à pâtisserie.

- Qu'est-ce qui se passe ici ? Joy… vous allez bien ? L'interrogea la vielle femme.
- Oui… très bien, Madame Sandburg, C'est juste… une dispute.
- Ah… je sais ce que c'est une dispute d'amoureux ! Seulement faite un peu moins de bruit, les voisins ne vont pas être contents si vous les réveiller, fit-elle avec un sourire coquin.

Elle referma sa porte rapidement et laissa Joy et Largo face à face. Le milliardaire ne savait que dire pour excuser son comportement quant à Joy, elle se sentait épuisée et espérait que Largo choisirait de partir mais il n'en fut rien. A contre cœur, elle l'invita à la suivre dans l'ascenseur. Ils montèrent en silence jusqu'à l'appartement de la jeune femme. Une fois la porte refermée, elle se tourna vers lui sans dire un mot.

- Joy… je te jure que c'est la première fois que je surveille ton appartement… j'étais tellement malheureux quand tu es partie…
- C'était une erreur, Largo, je t'ai dis que je ne voulais plus en parler.
- Mais je veux en parler ! J'en ai assez de faire semblant de n'avoir aucun sentiment pour toi, j'en ai assez de devoir te regarder sans pouvoir te toucher, d'être si près de toi et si loin à la fois, de…
- Et moi, Largo, le coupa Joy avec colère, tu ne t'es jamais demandé ce que je pouvais ressentir quand tu sortais avec d'autres femmes ?
- C'est toi qui à décider de notre rupture, protesta Largo.
- Cela ne voulait pas dire : " saute sur toutes les femmes qui passent à ta portée " ! Je pensais que tu avais besoin de temps pour mûrir, je me suis trompée, fit Joy avec tristesse.
- Que voulais-tu que je fasse ? Que je me jette à tes pieds, que je te supplie de revenir sur ta décision ? Tu ne l'aurais pas fait et tu le sais très bien !
- Sans doute mais de là à… et puis cela n'a aucune importance. Ce qui s'est passé ce soir n'était qu'un moment de faiblesse qui ne se reproduira pas.
- Mais je veux qu'il se reproduise ! Je n'ai jamais été aussi comblé qu'avec toi, Joy ! Tu ne peux pas imaginer ce que…
- Non ! Je ne veux rien savoir, l'interrompit la jeune femme, j'en ai assez de souffrir, j'en ai assez de te regarder embrasser d'autres femmes, je…

La solution lui apparut dans un éclair de lucidité. Il n'allait certainement pas être facile de le convaincre mais elle n'en pouvait plus de cette situation. Il en allait de son bien-être, de son équilibre, et il ne lui laissait pas le choix. Largo la contemplait en silence, attendant avec espoir qu'elle change d'avis, qu'elle ouvre une porte où ils auraient un avenir en commun.

- Je… je te donnerai ma démission demain, annonça Joy en évitant de le regarder dans les yeux.
- Je ne compr… ça veut dire que tu es d'accord ? Ça veut dire que nous allons…
- Non, Largo, je… je pense quitter New York dans quelques jours.
- Non…
- Je vais repartir de zéro ailleurs, cela vaut mieux pour nous deux.
- Non…
- Cette situation n'est plus gérable et…
- Joy, tu ne peux pas…
- Mais qu'est-ce que tu veux que je fasse, bon dieu ! Eclata Joy.
- Que tu viennes vivre avec moi, que tu me laisses te rendre heureuse, que tu portes mes enfants, que…
- Reviens sur terre, Largo ! Je ne ferais pas une bonne épouse pour toi. Et puis, que dirais le big board, les journaux s'en donneraient à cœur joie et…
- Mais je m'en fous ! S'écria Largo conscient de jouer ces dernières cartes pour l'empêcher de mettre son projet à exécution. Tu ne comprends donc pas que je me moque de ce que peuvent penser les autres ? Tu ne vois que je ne peux plus me passer de ta présence à mes cotés ? Tu ne vois que ce qui c'est passé ce soir n'est pas un accident mais que nous en avions envie tous les deux depuis longtemps ? Combien de temps encore vas-tu renier les sentiments que tu me portes Joy ? Combien de temps vas-tu douter de pouvoir être aimer ?
- Je ne…
- Tu sais quoi, la coupa Largo avec autorité, tu veux quitter le groupe, très bien. Je te suis. Je partirais avec toi quelle que soit la destination !
- Tu ne peux pas faire cela ! S'exclama Joy.
- Pourquoi ? Pourquoi ne pourrais-je le faire si le groupe W est la seule chose qui se dresse entre nous ? J'ai vécu de nombreuses années sans ce faste et ce luxe, je peux m'en passer si cela me permet d'être avec toi !
- Je n'ai pas le droit de te laisser faire. Regarde tout ce que tu as réalisé depuis que tu es à la tête du groupe, regarde les centaines de personnes que tu as aidées ! Si jamais tu pars, ils vont détruire tout ce que tu as mis si longtemps à construire, ils…
- Bon sang, par quel moyen dois-je te le dire Joy ? Je t'aime et rien n'a d'importance si tu n'es pas à mes cotés ! Je me fiche du groupe, je me fiche de l'argent, je me fiche du pouvoir. Tout ce que je veux, c'est être avec la femme que j'aime et cette femme, c'est toi ! Fit Largo sur un ton presque suppliant.

Joy avait du mal à croire ce qu'il lui disait. Il se jetait quasiment à ses pieds, il était prêt à renier son héritage, renoncer aux différents projets qu'il avait élaboré les deux dernières années, tout cela pour elle. Elle se sentait vidée après cette étrange soirée et ne savait plus vraiment ce qu'elle voulait faire.

- Ne pars pas, reprit Largo à mi-voix. Sincèrement, je crois que je ne le supporterais pas, continua-t-il en approchant de Joy.

Il la vit se battre avec ces démons intérieurs. Elle hésitait, ne savait si elle devait le croire, si elle pouvait lui faire confiance, si elle ne serait rien de plus qu'un numéro sur la longue liste des conquêtes du milliardaire. Elle l'aimait, elle le savait du plus profond de son âme mais elle savait aussi que l'amour était à double tranchant. Que les belles paroles de Largo pouvaient être effacées aussi vite qu'elles avaient été prononcées. Son cœur lui disait de le croire mais son esprit que la trahison n'était jamais loin, qu'elle ne devait jamais faire confiance à personne. Les barrières, qu'elle avait involontairement baissées depuis qu'elle travaillait pour le groupe, menaçaient d'exploser. Largo l'observait avec appréhension. Il ne voyait pas ce qu'il pouvait rajouter pour la convaincre de sa sincérité.

- Et si…
- Joy, murmura Largo en posant son index sur ses lèvres, le monde est fait de ce type de supposition. Ce que je sais, c'est qu'il y a quelque chose d'intense, de fort, entre nous et que je ne te laisserais pas partir sans me battre, pas comme la première fois.
- Je…

Les mots se coincèrent dans sa gorge. Ses yeux brillaient de larmes et Largo crut qu'il avait échoué. Pourtant Joy voulait seulement prononcer trois mots… trois mots qu'elle n'avait jamais dit à personne… trois mots qui semblaient anodin prit séparément mais qui, une fois réunis, avait un sens particulier.

- Je… je t'aime.

Elle avait l'impression d'avoir lâché une bombe de la force de celle d'Hiroshima, mais elle les avait dis et Largo avait peine à y croire. Elle venait de lui avouer qu'elle l'aimait, elle allait rester et ils allaient être heureux, avoir des enfants. Il se réveillerait chaque matin auprès d'elle, la couvrirait de cadeaux,… Les mots se pressaient à ses lèvres tandis qu'il enlaçait la jeune femme. Il n'osait croire à son bonheur. Leurs lèvres se trouvèrent avec ardeur, avec passion. Ils n'avaient plus conscience que de l'autre. Les doutes, les peurs, les craintes s'étaient envolées avec ces trois petits mots…. Largo prit Joy dans ses bras et trouva sans peine le chemin de sa chambre. Il la déposa avec douceur sur le lit et vint la rejoindre. Son désir de Joy était exacerbé par leur dispute. Il prit néanmoins sur lui pour ne pas effaroucher sa compagne et la déshabilla avec tendresse, déposant de légers baisers sur chaque partie de son corps. Les vêtements volèrent autour d'eux, leurs corps se frôlaient, les mains de Joy caressaient le dos musclé de Largo. Il lui sourit avant de la pénétrer lentement. Il voulait que ce moment reste gravé dans leurs mémoires. Joy sentit son cœur sur le point d'exploser. Elle n'avait jamais vécu de moment aussi intense de sa vie. Elle ne savait pas ce que l'avenir lui réservait mais si Largo était près d'elle, Joy savait qu'elle ne risquait rien. Le ballet de leurs deux corps s'accéléra, entrecoupés de baisers, de caresses. La jouissance vint les cueillir et les projeta dans un monde de plaisir pur. Ils étaient seuls, lovés dans les bras l'un de l'autre, et s'endormirent heureux comme ils ne l'avaient jamais été.

***

Epilogue

Kerensky regardait d'un œil absent son écran. Son café était posé près de son clavier mais il avait largement eu le temps de refroidir. Il n'avait pas oublié la soirée de la veille, ni l'attitude de Largo et encore moins le coup de poing qu'il avait reçu de celui-ci. Il se massa le menton, qui portait la trace de ce triste épisode, et se demanda comment il s'était terminé. Georgi n'était resté qu'un moment après avoir quitté le hall de l'immeuble. Il avait vu Largo et Joy monter dans l'ascenseur avant de partir rejoindre son appartement qui lui avait semblé vide et froid. La porte du bunker s'ouvrit et Simon apparut. Il descendit les quelques marches menant au poste de travail et s'arrêta pour contempler le Russe qui n'avait même pas remarqué son arrivée.

- Les USA appellent la Russie, me recevez-vous ?
- Très drôle, fit Kerensky lui lançant un regard noir.
- C'est quoi cette marque ? Tu as joué les preux chevaliers ?
- En quelque sorte.
- Oh ça a pas l'air d'aller fort, toi ! Dis-moi mon p'tit Georgichounet, qu'est-ce qui ne va pas ? Tu sais bien que tu peux tout dire à tonton Simon ! Fit celui-ci hilare.
- T'ais-je déjà dit que j'avais tué des gens pour moins que cela ? Répondit le Georgichounet en question d'une voix plus que glaciale.
- Ok, trêve de plaisanterie. La commission refait des siennes ?
- Non. Il va juste y avoir du changement et je ne suis pas certain que… peu importe. Pouah, fit Kerensky en recrachant la gorgée de café qu'il venait de boire.
- Quand je te dis que ton mélange est immonde ! Au fait, tu as vu Joy ?
- Non, répondit Georgi d'une voix neutre.
- Et Largo ?
- Non.
- Tu crois que…
- Je ne crois que ce que je vois et pour l'instant, je ne vois rien, fit Kerensky laconique.

Au même instant la porte du bunker s'ouvrit, Largo et Joy rejoignirent leurs amis, le sourire aux lèvres.

- Nan, c'est pas vrai, fit Simon avec son tact coutumier ! Non mais vous avez vu l'heure tous les deux, il est presque… 17h !!!
- Toujours aussi délicat, commenta Kerensky.
- Ravie de constater qu'on vous a manqué, dit Joy avec un petit sourire qui en disait long sur les quelques heures qu'elle avait passé avec Largo.
- Je vais avoir besoin de vous, annonça le milliardaire avec malice. Je… nous allons, Joy et moi, nous absenter quelques jours et je compte sur vous pour veiller à la sécurité de…
- T'inquiètes pas mon pote, on se charge de tout ! Le coupa Simon. Et… félicitations !!!!!! S'écria Simon avant de prendre Largo dans ses bras.

Kerensky regarda la scène sans dire un mot. Ainsi ils ne se tourneraient plus autour ces deux-là, c'était une bonne chose même si la donne allait être changée et que la vie lui rappelait, une fois de plus, qu'il allait finir sa vie seul. Le poids des choix qui avait marqué son existence lui pesait de plus en plus mais il repoussa cette pensée pour se concentrer sur ceux qui étaient devenu ses amis.

- Hum... si tu continues je vais mourir étouffé Simon, s'écria Joy qui avait, à son tour, droit à un " câlin made in Simon ".
- Ah, avant que j'oublie. Il y a quelqu'un que je veux vous présenter. Etant donné que Joy va devenir ma femme, enfin je ne doute pas de lui faire accepter l'idée avant notre retour, on a trouvé quelqu'un pour la remplacer en tant que garde du corps seulement…
- Seulement, vous ne l'emmenez pas avec vous donc vous voulez qu'on lui montre les lieux, c'est ça ? L'interrompit Simon.
- Oui mais… en fait, je crois que Kerensky sera le mieux placé pour cela.

L'intéressé leva un œil scrutateur sur Largo se demandant ce qu'il entendait par cette phrase. Simon, légèrement déçu, attendait la suite avec impatience. Joy alla ouvrir la porte et fit signe à quelqu'un d'entrer. Une jeune femme apparue, vêtue d'un tailleur-pantalon vert clair, ses cheveux roux regroupés en un chignon indiscipliné dont s'échappaient quelques mèches folles, elle pénétra dans le bunker sous l'œil attentif de Simon et Georgi. Ce dernier jeta un œil distrait sur l'inconnue avant de la reconnaître.

- Bonjour Georgi, le salua la jeune femme, Simon.
- Tiens, tiens, tiens, fit ce dernier avec un grand sourire. Cela fait longtemps qu'on ne t'avais pas vu !
- J'étais de passage pour voir Joy mais… Largo m'a fait une offre qui ne se refuse pas et puis, j'ai besoin de changer d'air. Los Angeles et ses surfeurs commencent à me taper sur les nerfs.

Kerensky écoutait sans mot dire. Il avait du mal à réaliser que la jeune femme venait d'être embauchée par Largo. L'Intel Unit l'avait rencontré quand il menait une enquête sur la mort de plusieurs employés du groupe W. Sarah était inspectrice et, à l'encontre de ce qu'avaient fait ses confrères, avait décidé de les aider à coincer le meurtrier. Elle avait été mutée à Los Angeles à la suite de cette affaire car un de ses équipiers avait perdu la vie lors de l'arrestation de l'assassin. Ayant mené son enquête avec des civils, sans tenir compte de l'avis de ses supérieurs, elle avait été éloignée de New York manu militari. Elle avait passé sa dernière nuit avec l'Intel Unit. Largo s'en voulait un peu d'être la cause de son exil mais, malgré toute son influence, n'avait rien pu faire pour l'empêcher. Kerensky s'était proposé de raccompagné leur nouvelle amie à son appartement ce qui n'était pas totalement innocent car Sarah lui plaisait beaucoup. Ils avaient été amants cette nuit-là, sans rien se promettre, sans rien demander. Joy le savait car la jeune femme était restée en contact avec elle, les deux femmes étaient devenues amies. Lorsque Sarah avait démissionné de la police, Joy l'avait mise en contact avec un ami qui tenait une agence de garde du corps. La vie vous réservait de drôles de tours, songea Joy en quittant le bunker avec Simon et Largo, laissant Sarah et Kerensky en tête-à-tête. Elle ne pensait plus qu'à son bonheur d'avoir trouver cet homme presque parfait. L'expression la fit sourire. Elle avait confiance maintenant, elle ne serait plus jamais seule.


The end !